Nouveau : « Les contes de Maminou » 
"Les contes de Maminou 2" sont  édités

Histoires

Maxime Rossier

Une petite histoire est née au cours d’une balade en forêt… Puis d’autres ont suivi…
Elles sont le résultat de nombreuses années passées dans l’univers des enfants et des parents, ainsi que les outils glanés le long de mes différentes formations.


Elles peuvent permettre, entre autre...

  • d’aborder des thèmes importants pour l’enfant et les parents, tel que la séparation, la différence, la spiritualité, la confiance en soi…
  • d’apprendre à reconnaître ses émotions, de les accueillir et de les dépasser.
  • de porter un autre regard sur ce qui nous entoure en prenant conscience de nos projections et de nos interprétations.

Vous en découvrirez, occasionnellement, sur ce site

J'ai suivi dernièrement une formation de conteuse avec Florence Kammermann et Marie-Adèle Hemmer. Vous trouverez des infos  sur son site: www.les-petits-racont-art.ch

  • Vermeille

    Un jour, que je me promenais, j’ai trouvé au bord du chemin une petite plume. Je la trouvais si jolie, blanche, toute douce, que je l’ai ramassée. Elle était certainement sur le dos d’un oisillon, avant d’être là.
    Comme un trésor trouvé sur le chemin, je l’ai mise dans ma poche.

    Je continuais ma promenade, en l’oubliant complètement…. Quand tout à coup, j’entendis une petite voix :

    - Tu veux que je te raconte mon histoire ?

    Surprise, je m’arrête. Je regarde de tous les côtés…Je n’y vois personne…juste des arbres, des buissons
    La petite voix repris :

    - Je suis là dans ta poche…veux-tu connaître mon histoire ?

    - Quoi, c’est toi…la petite plume que j’ai ramassée ? C’est bien toi qui me parle ?

    - Mais oui c’est bien moi…alors tu la veux mon histoire ? enfin pas vraiment la mienne, mais celle de l’oisillon sur lequel j’ai grandi. Tout compte fait c’est aussi un peu la mienne, j’étais avec lui jusqu’à ce qu’il ose prendre son envol…

    Bien sûr que je la veux…Je m’assied en bordure de forêt sur un tapis d’herbe toute tendre, réchauffée par le soleil, la petite plume posée dans le creux de ma main…je tends l’oreille pour l’écouter…

    … Il y a déjà quelques semaines que Maman et papa oiseau préparent un nid, avec beaucoup d’amour pour accueillir leurs petits. Ils cherchent tout ce qu’il y a de plus doux. Ils le construisent solide pour qu’il résiste au vent, à la pluie…et aussi, bien sûr, assez haut pour échapper aux prédateurs…
    Maman oiseau met au monde 4 oisillons, enfin pour le moment, se sont quatre œufs qu’elle dépose dans ce nid douillet, Parmi ceux-là, il y a Vermeille, sur lequel j’ai grandi…

    Que la vie est agréable dans cet œuf… Vermeille, à l’intérieur de ce cocon se sent en parfaite sécurité. Il se développe tous les jours un peu plus…. Mais… plus il grandit, moins il a de place… si cela continue, ce petit coin de paradis va devenir trop petit…

    Un matin il entend des petits craquements à côté de lui. Ce sont ses frères et sœurs, qui ont commencé à casser leur coquille.
    Il sent que s’il ne s’y met pas, lui aussi, tôt ou tard il va étouffer… c’est une question de survie.

    Alors courageusement, avec son petit bec, il tape sur cette coquille pour créer un petit trou… c’est long… Parfois le découragement le prend, il trouve cette enveloppe beaucoup trop solide. Il sent le découragement l’envahir. De plus, dans ces moments, une petite voix dans sa tête lui répète…Je ne suis pas capable…Je ne vais jamais y arriver…

    Oh là là ! comme j’aimerais l’aider, moi, la petite plume toute minuscule sur son dos. Pourtant, je sais qu’il a la force d’y arriver puisqu’il est né oiseau…Je sais aussi que la Grande Vie l’accompagne pour ce passage.

    Heureusement, son envie de vivre est plus forte que ces peurs…après un dernier gros effort, il se retrouve dehors…
    Ouah ! Quel régal ! en brisant sa coquille, il a trouvé… la liberté.
    Un sentiment de joie l’envahit…Que c’est bon d’avoir réussi.

    Il est tout heureux de cette nouvelle vie qui commence. Une vie qu’il découvre merveilleuse. Il est nourri, protégé. Il est bercé par les piaillements mélodieux de sa maman. Parfois bien sûr, il se chamaille avec ses frères et sœurs, ou encore, il a peur les jours de gros vent que la branche de l’arbre sur lequel il se trouve ne se casse… Heureusement ses parents sont toujours là pour le rassurer et pour lui redonner confiance.

    Cependant, au fond de lui, Vermeille sait que cette façon de vivre ne va pas durer…. Il n’est pas né pour rester dans un nid. D’ailleurs, il sent, comme dans sa coquille, que ce nid devient trop petit. Ces quatre oisillons, grossissent, grandissent, prennent de plus en plus de place.
    De plus, Les plumes de bébés, dont je fais partie, partent pour laisser place à des plumes de grands oiseaux.

    Par chance je suis restée dans le nid, j’ai bien envie de découvrir que va devenir mon petit oisillon.

    Un soir leur papa leur annonce que demain ils vont apprendre à voler.
    Alors là, c’est la panique à l’intérieur de Vermeille. Il voyait bien ses parents ouvrir leurs ailes et quitter le nid en s’envolant dans le vide, mais ce n’était pas pour lui…
    Autant dire que toute la nuit des pensées tournent dans sa tête, il n’arrive pas à trouver le sommeil… Je ne vais pas y arriver… je vais m’écraser par terre…je ne suis pas né pour ça…

    Au matin il entend son papa :

    - Alors mes oisillons, prêt pour la première leçon ?
    Il est loin de se douter qu’un de ces petits s’est laissé envahir par la peur.

    Il leur apprend à bouger leurs ailes, à s’envoler jusqu’au bord du nid…puis sur la branche d’à côté… Ses frères et sœurs, tout excité à l’idée de pouvoir voler, rigolent, s’amusent, font des essais et s’envolent toujours un peu plus loin… sous le regard attentif de leur père

    Vermeille est le seul à hésiter. Il se contente de se poser sur le rebord du nid.
    Il trouve cela trop, trop, horrible. Il y a le vide qui l’attend, il s’imagine déjà tout écrabouillé par terre.

    Heureusement papa a de la patience. Il rassure son petit oisillon et lui dit que cela ira certainement mieux demain…

    Mais le lendemain il n’a pas plus de courage, ni le jour d’après, ni le suivant… Papa commence à perdre patience

    - Vermeille tu es un oiseau, tu as des ailes tu es fait pour voler… Fais un effort…

    - Non pas question de me jeter dans le vide, j’ai décidé… je resterai toute ma vie, un oiseau de nid

    Ses parents ne savent vraiment plus que faire

    Alors là, moi la petite plume, je me dis qu’il faut que je l’aide…
    Ce n’est pas possible de rester dans un nid toute sa vie. Il va mourir d’ennui. De plus, ce nid, même si ses parents en prennent soin, commence à s’effilocher, il ne va pas durer encore longtemps. Soudain, j’ai une idée… la nuit prochaine, je vais me glisser dans ses rêves…et voilà…

    Pendant son sommeil je lui chuchote :

    -Vermeille tu es un oiseau, tu es fait pour voler, tes parents le savent bien. Tu as la force au fond de toi pour y arriver…. Rappelle- toi quand tu as brisé ta coquille, la joie et le sentiment de liberté que tu as ressentie, je suis certaine que cela sera pareil quand tu oseras t’élancer… De plus, tu ne t’élances pas dans le vide, le vide n’existe pas… l’air est là pour te porter, t’accompagner…
    Regarde…
    Et dans son rêve… il prend son envol… il s’élance dans ce qu’il croyait être le vide… Il est soutenu… Il virevolte d’un côté, de l’autre… il se sent tout heureux, libre…

    Au réveil Vermeille n’est plus le même. Son rêve est encore très présent à l’intérieur de lui… Il a encore quelques peurs, quelques doutes, mais il n’a aucune envie de les laisser prendre toute la place…. Son regard a changé… Il pense surtout à la liberté qu’il va découvrir… Il se sent prêt à apprendre, au grand plaisir de son papa…

    Timidement d’abord, sur la branche d’à côté, puis un peu plus loin… et puis… Le grand saut… s’élancer dans… le vide…
    Et c’est vrai…ce n’est pas le vide qu’il rencontre, comme dans son rêve, l’air est là pour l’accompagner, pour le soutenir.
    Quel régal… ! Et pour moi aussi quelle joie de pouvoir assister au premier vol de mon petit oisillon.

    Et voilà, un jour il n’est pas revenu vers son nid… il a pris son envol pour de bon… Il a commencé sa grande vie d’oiseau…

    Quant à moi, un coup de vent m’a emporté et déposée sur le bord du chemin où tu m’as trouvée et tu peux me prendre avec toi, si tu en as envie

    Touchée par cette histoire… m’imaginant le courage que Vermeille a dû avoir pour son premier vol… je remerciais la petite plume et la remit avec beaucoup de précaution dans ma poche.

    Elle m’accompagne toujours et quand j’ai besoin de courage je pense à Vermeille… Parfois j’ai même l’impression d’entendre cette petite plume me murmurer :

    - Tu n’es pas tout seul, tu es toujours accompagné… le vide n’existe pas…

  • Etincelle le petit éléphant

    Au cœur de la jungle, tout paraît paisible. C’est l’été, il fait très chaud. Le soleil est au plus haut dans le ciel. La plupart des animaux sont assoupis et attendent un peu de fraîcheur pour partir chasser.

    Pourtant, si l’on y regarde bien, malgré la chaleur, l’agitation est à son comble dans une tribu d’éléphants.

    Une éléphante est en train de donner naissance à un éléphanteau.
    Rien d’extraordinaire me direz-vous?
    Cependant, cette éléphante est la compagne du chef, et si ce nouveau-né est un mâle, il deviendra leur futur chef.
    Tous les éléphants se sont donc réunis et attendent, impatiemment, l’heureux évènement.

    En s’approchant de plus près, on peut entendre :
    - Ce sera sûrement un mâle… Moi, je pense plutôt une femelle… Il aura peut-être les oreilles de sa mère… J’espère qu’il saura être un grand chef comme son père….

    Plus loin, on voit le chef de la tribu, marcher lourdement, de long en large.
    Lui, c’est la première fois qu’il devient père… Sera-t-il à la hauteur de son rôle de père ? Si c’est un mâle, saura t’il lui apprendre à devenir un vrai chef, un vrai chef, comme lui, pour le remplacer ?...

    Il s’en pose des questions !
    Il est partagé, entre la joie d’être père et la responsabilité qu’il aura, dès l’arrivée de cet éléphanteau, qui ne saurait tarder.

    Bientôt on entend l’éléphante barrir, signe que l’éléphanteau est né.
    Avec respect, le troupeau laisse passer le chef en premier pour découvrir son fils, car c’est un mâle. Puis, les autres, suivent dignement derrière.
    Le père, tout ému, s’approche et tendrement passe sa trompe sur le dos de son petit.

    Dans la troupe on entend :
    Félicitations… Qu’il est beau… C’est un mâle, je l’avais bien dit…
    Ce soir-là, c’est la fête au pays des éléphants pour souhaiter la bienvenue à « Etincelle », car c’est ainsi qu’il s’appelle.

    Les années passent. Etincelle se porte à merveille, ses parents sont fiers de lui. Il obéit vraiment très bien, même si ce n’est pas toujours facile.
    Ses parents ont tellement envie de réussir son éducation et, par le fait même, tellement peur qu’Etincelle ne soit pas à la hauteur, qu’ils lui mettent de nombreux interdits. Ils lui enseignent des règles de vie, qu’eux jugent importantes, avec leur regard et leurs croyances, afin qu’il devienne un vrai chef plus tard.

    Souvent, Etincelle doit se contenter de voir les autres éléphanteaux jouer, se rouler dans la boue, car il entend son père lui répéter souvent :
    - Un futur chef ne fait pas cela.

    Il a pris l’habitude d’être en accord avec son père. Pourtant, au fond de lui, une petite voix lui dit parfois :
    - Est-ce vraiment juste de ne pas pouvoir m’amuser avec les autres ? Et surtout de paraître différent des autres?

    Mais comme il ne veut pas décevoir ses parents, il reste un éléphanteau sage, beaucoup le montre en exemple.

    Malgré tout cela, Arnold, le père a tout de même un souci.
    Etincelle, en grandissant, est de plus en plus apprécié par tout le monde.
    Il faut dire qu’il porte bien son nom. S’il y a une dispute, Etincelle arrive par quelques mots à apaiser le conflit et à permettre de trouver un terrain d’entente. Si Etincelle voit un éléphant triste, il s’en approche et, par beaucoup d’écoute, lui redonne le sourire.
    De plus en plus souvent, on prend l’habitude de l’appeler lorsque surgit un problème, ou tout simplement, pour être en sa compagnie. Il est toujours disponible et prêt à rendre service.

    Son père le trouve beaucoup, mais beaucoup trop gentil. Il se demande si son fils sera un bon chef plus tard. Un chef, pour lui, c’est quelqu’un qui commande et qui ne s’occupe pas trop de tous les soucis des autres. Il tente de faire comprendre cela à Etincelle.

    Lors des déplacements, il prend Etincelle à côté de lui pour lui enseigner la vie de chef.
    On l’entend souvent lui dire :
    - C’est moi le chef, c’est moi qui décide. Plus tard quand je serai vieux, c’est toi qui dirigeras et décideras.

    Malgré toute sa bonne volonté de plaire à son père, malgré sa peur de le décevoir et tout le respect qu’il lui porte, Etincelle se sent de plus en plus en désaccord avec celui-ci. Il sent au fond de lui qu’il ne pourra pas décider pour tous les autres.
    Si être chef c’est cela, il préfère ne pas l’être.
    Il garde cela comme un secret au fond de lui ; mais ce secret, comme tous les secrets tenus trop longtemps à l’intérieur de soi, le fait de plus en plus souffrir.

    Un matin, Etincelle n’y tient plus. Il pique une colère, une vraie colère d’éléphant, on l’entend très loin à la ronde. Son père a de nouveau pris une décision sans tenir compte des autres.

    IL se met alors devant celui-ci et lui dit :
    -Je ne veux pas être un chef comme toi ! Je ne veux pas et ne peux pas décider sans tenir compte des autres. A partir d’aujourd’hui, je ne reste plus à côté de toi, je refuse d’être le prochain chef.

    Sur ce, il s’enfuit à toutes jambes et se réfugie derrière un énorme arbre, un baobab, redoutant la colère de son père.

    Depuis ce jour, nous ne voyons plus Etincelle marcher au côté de son père. Il marche derrière et suit tristement la tribu.

    Ça ne peut plus durer ainsi, se dit Arnold, il faut trouver une solution. Je n’ai qu’un fils et il faut qu’il soit le chef plus tard… Que fera ce clan, sans personne qui le commande ?

    Parmi tous les éléphants, il y en a un plus vieux, plus sage. C’est vers lui que vont tous les éléphants pour se confier, quand ils ont un souci, ou besoin d’un conseil ; à part le chef, bien sûr, qui, jusqu’à maintenant, a toujours voulu, et pu, se débrouiller tout seul.

    Pourtant, aujourd’hui, on le voit se diriger vers le sage Mamadou, car il reconnaît avoir besoin d’aide.
    Mamadou a tout observé et Etincelle est déjà venu lui confier ses difficultés.
    Il est heureux de recevoir Arnold et souhaite de tout cœur aider le chef et son fils à se comprendre… Surtout que cette situation devient insupportable pour toute la tribu.

    Après l’avoir longuement écouté, Mamadou lui dit :
    - J’entends ton souci de chef et ta peur de laisser la tribu sans personne pour les diriger. Mais vois-tu Arnold, Etincelle ne voit pas les choses comme toi, il ne peut pas fonctionner comme toi, s’il devient le prochain chef.

    Arnold est tout étonné de ce qu’il entend. Il était sûr qu’il détenait la vérité et que lui seul pouvait apprendre à Etincelle à être un chef comme lui.

    Mamadou lui dit encore :
    -Etincelle a des idées nouvelles. Il parle d’être chef en écoutant les autres, en acceptant leurs idées. Il rêve d’une tribu où chacun puisse prendre une place et, si un problème surgit, que l’on se mette ensemble pour trouver une solution. Laisse de la place à Etincelle et fais lui confiance.

    Arnold écoute. Il sent que quelque chose résonne, juste, à l’intérieur de lui, dans ce que dit Mamadou. Cependant, il doit lâcher ce qu’il a toujours cru vrai jusqu’à maintenant et cela lui fait vraiment très peur.

    On voit le chef s’éloigner des siens. Il a besoin d’être seul pour réfléchir à ce qu’il vient d’entendre et faire un bout de chemin à l’intérieur de lui.

    Quand il revient, il appelle Etincelle. Ils ont une grande discussion.
    Pour la première fois, Etincelle se sent entendu par son père.
    Cela lui fait tellement chaud au cœur que des larmes de joie coulent de ses grands yeux d’éléphant. Enfin, il est reconnu dans ce qu’il est, au plus profond de lui.

    Depuis ce jour, Etincelle a repris place au côté de son père. Pas une place pour apprendre à être comme lui, mais une place où il peut amener sa couleur et vivre sa place de chef à sa manière.